Je laisse ici une petite liste de mots issue du livre de Henri Rostolland "Névache et la vallée de la haute Clarée" (1982).
Le nom de Névache provient de ANNEVASCA (premier nom attesté), signifiant probablement "enneigé". On pourrait y reconnaître une origine ligure, notamment grâce à la terminaison -asca. Le nom en occitan standardisé est Nevascha cependant, je préfère écrire Nevatso afin de retranscrire fidèlement la prononciation locale.
Le patois de Névache est l'un des derniers points occitans qui touche la limite entre les domaines occitans et arpitans. La facilité d'accès entre les vallées de la Clarée et de la Maurienne a vraisemblablement laissé des marques dans la langue locale que Rostolland a qualifiée d'être plus âpre et sèche.
En amont de descriptions phonétiques approximatives, cette petite liste (voir plus bas) nous permet de tirer quelques conclusions sur le patois de Névache.
- Féminin en -o (singulier) et -a (pluriel)
- Traitement en tsa / dza des CA / GA latins (ce traitement, courant en occitan est pourtant peu fréquent en Briançonnais, on le retrouve à St-Martin-de-Queyrières, et partiellement au Monêtier, mais aussi à Pragelas) : GALLINAm > jarino > dzariro (poule)
- Rhotacisme du -n- intervocalique (traitement présent à Villar-St-Pancrace, Vallouise etc): dounà > dourà (donner)
- Rhotacisme du -l- intervocalique (quasi général en Briançonnais): STELLAm > eitièro.
- Amuïssement non total mais fréquent des consonnes finales. Ce traitement tend à être plus marqué sur le versant français.
- Palatalisation du s- devant /i/ (comme à Villar-St.-Pancrace): civaa > shivà (avoine)
Il semble, d'après les enquêtes linguistiques effectuées à Névache, et notamment les recueils de l'ALP (Atlas Linguistique de Provence), que les relevés ne concordent pas avec les mots donnés par Rostolland. Plusieurs explications sont possibles, telles que, la variation dialectale au sein du même village, car n'oublions pas que Névache est composé de nombreux hameaux, voire simplement une certaine confusion de l'auteur... En attendant, le parler de Névache s'étant très certainement éteint aujourd'hui, il nous faudra nous contenter de ces quelques notes, mais en les prenant avec des pincettes...
arapà = saisir
atsampà = entasser
avizà = regarder
croussà = bercer
dourà = donner
dzarà = geler
eigà = arroser
ità = rester
se quesà = se taire
reià = répandre
pià = boire (origine floue: *pi- racine indo-européenne pour "boire" absente dans les langues romanes...)
pouà = monter
sirà = dîner
saoupre = savoir
eicoundre = cacher
aouvi = entendre
ubri = ouvrir
amavo = j'aimais
anèn ! = allons !
vengu = venu
eiro = maintenant
dzi = rien
eilai = par là
eishi = ici
eissai = par ici
hin = très
segu = sûr, bien sûr
gramashi = merci
bua = lessive
cubèt = toit (< Lat. COPERTUm)
dzerlo = cuve, vase (< Lat. GERULAm)
fessou = pioche
ho = jardin (< LAt. HORTUm)
aouro = vent
eitièro = étoile
lavantso = avalanche
eitsareinho = pente raide décharnée
sourè = soleil
meinàs = jeunes garçons
eimadzo = image
faoudi = tablier
gouro = bouche (< Lat. GULAm)
mèi = milieu
viòou = sentier, chemin
peirò = chaudron
tièro = toile
trin = fourche, trident
tsasà = chazal, chalet en ruine
fea = brebis, pl.
artsensaro = gentiane
lambrutsa = groseillers, pl.
shivà = avoine
cèbo = oignon
bertso = brèche
laouvitè = petit lac
paouto = boue
pertús = trou, ouverture
sanha = marais, marécages, pl.
manzo = génisse
murè = marmotte (< Lat. MUREm, souris?)
puè = porc
rata-penata = chauve-souris
dzariro = poule
tsaourio = corneille
sé, F. = serpent
nièro = puce
couo-fourtso = pince-oreille (Cf. français régional de Maurienne: fourche-à-cul)
tavà = taon
toutso = taillis, bois
tsarantso = ravin (Cf. toponymie: chalanche)
clot = plateau (Cf. toponymie: clot)
casso = éboulis (Cf. toponymie: casse)